TRANSMISSION – Assurance-vie, démembrement de propriété, donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit – Optimisation des choix !
La loi SAPIN II vient ternir l’attractivité de l’assurance-vie. L’article 49 de la loi modifie le 5° de l’article L.632-2-1 du Code monétaire et financier en donnant la possibilité au Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) de limiter temporairement l’exercice de certaines opérations ou activités, y compris l’acceptation de primes ou versements, de limiter temporairement pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat et de retarder ou limiter temporairement, pour tout ou partie du portefeuille, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat..
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De telles mesures peuvent priver les épargnants de la libre disposition des fonds investis sur le contrat d’assurance-vie pendant une période maximale de trois mois renouvelable, sans excéder six mois.
Le but est de permettre d’éviter, qu’en cas de remontée soudaine des taux actuellement très bas (pour les contrats fonds euros classiques), les épargnants ne retirent massivement les sommes investies sur de tels contrats (fonds euros classiques) pour les réinvestir sur des placements de meilleure rentabilité financière, au risque de mettre en péril le système actuel.
Lorsque les primes ont été versées sur un contrat d’assurance-vie par un souscripteur âgé de moins de 70 ans, les bénéficiaires désignés bénéficieront, chacun, d’un abattement de 152.500 euros.
En matière de succession, les héritiers ne bénéficient que d’un abattement de 100.000 euros.
Comparatif d’une transmission d’un capital aux enfants en cas de décès :
Succession – Actifs compris dans la succession | Assurance-vie : capitaux décès issus d’un contrat pour des primes versées avant 70 ans | |
Abattement par héritier / bénéficiaire | 100 000 | 152 500 |
Tarif applicable | Taxation | |
N’excédant pas 8.072 | 5% | 20% jusque 700.000 euros |
Comprise entre 8.072 et 12.109 | 10% | |
Comprise entre 12.109 et 15.932 | 15% | |
Comprise entre 15.932 et 552.324 | 20% | |
Comprise entre 552.324 et 902.838 | 30% | |
Entre 902.838 et 1.805.677 | 40% | 31,25% au-delà de 700.000 |
Au-delà de 1.805.677 | 45% |
La clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie peut être démembrée entre le conjoint et les enfants. Dans ce cas, au dénouement de la clause, la valeur de la nue-propriété revenant aux enfants dépendra de l’âge du parent usufruitier décédé. Le % représentant la valeur de la nue-propriété sera également utilisé pour le calcul de l’abattement de 152.500 euros.
Cas pratique
Madame Dupont est âgée de 66 ans et son mari de 69 ans. Ils ont deux enfants.
Ils sont mariés sous le régime de la communauté universelle avec adjonction d’une clause d’attribution intégrale au profit du conjoint survivant. De ce fait, les enfants n’hériteront de leurs parents qu’au jour du décès du dernier d’entre eux.
Le patrimoine du couple est composé comme suit :
- Résidence principale : 3.600.000 euros
- Capital : 400.000 euros
TOTAL : 4.000.000 euros
Le couple n’a pas besoin de revenus complémentaires.
Les critères communs à l’ensemble de nos calculs seront les suivants :
- Le patrimoine est réputé commun pour sa globalité
- La valeur des biens immobiliers est réputée constante
- Les liquidités disponibles sont placées à 3% net d’impôt et de CSG
- La fiscalité est réputée constante
- Le premier conjoint décède en N+20 et le second conjoint très peu de temps après
- Le conjoint survivant ne consomme pas le patrimoine transmis après le décès de son conjoint.
Quid en cas de décès soudain d’un des époux sans qu’aucune stratégie patrimoniale n’ait été mise en place ?
La somme de 3.400.000 d’euros est placée sur un compte titre au taux de 3% net de tout impôt et taxe.
Après 20 années de placement, le capital s’élève à 6.140.778 euros.
Au premier décès, le patrimoine s’élève à 6.740.778 euros (6.140.778 + 600.000 immobilier ) et le conjoint survivant hérite de la totalité du patrimoine en exonération d’impôt.
Peu de temps après, au décès du conjoint survivant, les enfants héritent chacun de 3.370.389 euros, ce qui génère par enfant, 1.234.069 euros de droits de succession, soit un total de droits de succession de 2.468.138 euros, soit une pression fiscale d’environ 36,61%.
- Dans ce cas, le patrimoine net transmis par les deux parents à leurs enfants s’élève donc à 6.740.778 – 2.468.138 = 4.272.640 euros.
Bien sûr, l’objectif de protection du conjoint est pleinement atteint, et c’était là la volonté des époux, mais, l’optimisation fiscale est désastreuse car les biens n’ont été transmis que d’une tête vers les enfants.
A l’analyse du tableau repris à la page n° deux, les époux pourraient se convaincre de la pertinence du contrat d’assurance-vie.
Quid de la situation fiscale et patrimoniale si la totalité du capital disponible était placé sur un contrat d’assurance-vie ?
Par hypothèse, le contrat d’assurance-vie serait co-souscrit, c’est-à-dire, que les deux époux seraient souscripteurs et que le dénouement du contrat (le paiement des capitaux décès) se réaliserait au dernier décès vers les enfants, à parts égales.
Une somme de 3.400.000 euros serait investie sur un contrat d’assurance-vie et placée au taux net de 3% hors impôt et taxe.
Au décès du premier conjoint, la valeur de rachat du contrat d’assurance-vie s’élève à 6.140.778 euros, le contrat n’est pas dénoué (les capitaux décès ne sont pas versés) puisque le conjoint survivant est encore seul souscripteur. Il n’y a aucune fiscalité car le conjoint survivant est totalement exonéré d’impôt.
Au décès du conjoint survivant, peu de temps après le décès du premier conjoint, le contrat se dénoue et le capital décès est versé à concurrence de la moitié (3.070.389 euros), à chacun des enfants bénéficiaires, ces derniers héritant chacun, par ailleurs, de la moitié de la valeur de la résidence principale, soit 300.000 euros.
Fiscalité au deuxième décès du contrat d’assurance-vie :
Somme transmise à chaque enfant : 3.070.389
Abattement : 152.500 (-)
Assiette taxable : 2.917.889
Taxe sur la tranche de 700.000 euros (20%) : 140.000
Taxe sur la tranche de 2.217.889 euros (31,25%) : 693.090
Total un total de taxe de : 833.090
Fiscalité sur les biens immobiliers hérités :
Somme transmise à chaque enfant (600.000 /2) : 300.000
Droits de succession : 58.190
Total des droits payés par chaque enfant : 833.090 + 58.190 = 891.280 euros
Total des droits et taxes payés par les deux enfants : 1.782.560 euros
- Dans ce cas, le patrimoine net transmis par les deux parents à leurs enfants s’élève donc à 6.740.778 – 1.782.560 = 4.958.218 euros.
- L’économie par rapport au premier schéma est de 685.578 euros !
C’est bien, mais il est possible de faire mieux, et la question est :
Quid de la situation fiscale et patrimoniale si la totalité du capital disponible était placé sur un contrat d’assurance-vie avec une clause bénéficiaire démembrée entre le conjoint et les enfants ?
Prenons l’hypothèse d’une clause stipulant le versement des capitaux décès au premier décès vers le conjoint en usufruit et vers les enfants en nue-propriété.
Monsieur décède en premier et Madame est alors âgée de 86 ans (en N+20).
Fiscalité du dénouement de la clause
Valeur de rachat du contrat au décès de Monsieur : 6.140.778
Valeur de la nue-propriété (barème article 669 CGI), soit 80% : 4.912.622
Valeur de la nue-propriété reçue par chaque enfant : 2.456.311
Abattement du nu-propriétaire (152.500 x 80%) : 122.000 (-)
Assiette taxable par enfant nu-propriétaire : 2.334.311
Taxe de 20% sur la tranche de 700.000 euros : 140.000
Taxe de 31,25% sur la tranche excédentaire : 510.722
Total taxe subie au premier décès par enfant : 650.722
Total des taxes (2 enfants) : 1.301.444
Capital transmis au 2è décès (6.140.778 – 1.301.444) : 4.839.334
Fiscalité sur les biens immobiliers hérités :
Somme transmise à chaque enfant (600.000 /2) : 300.000
Droits de succession : 58.190
Total des droits payés par chaque enfant : 650.722 + 58.190 = 708.912 euros
Total des droits et taxes payés par les deux enfants : 1.417.824 euros
- Dans ce cas, le patrimoine net transmis par les deux parents à leurs enfants s’élève donc à 6.740.778 – 1.417.824 = 5.322.954 euros.
- L’économie par rapport au premier schéma est de 1.050.314 euros !!
- L’économie par rapport au deuxième schéma est de 364.736 euros !
C’est bien, mais il est possible de faire mieux, et la question est :
Quid de la situation fiscale et patrimoniale si la totalité du capital disponible était placé sur un contrat d’assurance-vie avec une clause bénéficiaire démembrée entre le conjoint et les enfants avec une sortie en « quasi-usufruit » ?
Prenons l’hypothèse d’une clause stipulant le versement des capitaux décès au premier décès vers le conjoint en quasi-usufruit et vers les enfants en nue-propriété.
Fiscalité au premier décès : Idem cas précédent
Fiscalité au 2ème décès : néant, et les enfants bénéficient d’une créance de restitution du montant des capitaux transmis qu’ils pourront faire valoir au passif de la succession du second parent.
Ainsi, cette créance de restitution viendra annuler la base imposable aux droits de succession en rapport avec les biens immobiliers transmis (600.000 euros, soit 300.000 euros par enfant), sur lesquels les enfants n’auront plus de droits de succession à payer, soit un gain fiscal par enfant de 58.190 euros, donc un gain total, pour les deux enfants de 116.380 euros.
- Dans ce cas, le patrimoine net transmis par les deux parents à leurs enfants s’élève donc à 6.740.778 – 1.301.444 = 5.439.334 euros.
- L’économie par rapport au premier schéma est de 1.166.694 euros !!
- L’économie par rapport au deuxième schéma est de 481.116 euros !
- L’économie par rapport au troisième schéma est de 116.380 euros !
C’est bien, mais il est possible de faire mieux encore, et la question est :
Quid en cas de donation avec réserve d’usufruit réciproque !
Certes, le contrat d’assurance-vie est incontournable dans les stratégies de transmission, c’est une évidence.
Mais, l’intérêt du contrat d’assurance-vie, d’un point de vue successoral, diminue à mesure que le patrimoine de ce même contribuable augmente.
En effet, le contrat d’assurance-vie dont les capitaux décès sont soumis à l’article 990 I du CGI (primes versées avant l’âge de 70 ans), présente une faille non négligeable dans la mesure où les taux de taxation (cf ci-dessus) s’appliquent sur le capital (primes versées) + son entier accroissement.
Cela n’est pas le cas d’un portefeuille qui serait donné en nue-propriété aux enfants. En effet, grâce à la donation de la nue-propriété aux enfants, les droits de donation ne sont dus que sur le capital donné, tout l’accroissement généré par sa gestion sera transmis sans taxation (article 1133 du CGI), et sur une partie réduite de ce capital grâce à la réserve d’usufruit.
Montant des droits de mutation à titre gratuit (donation)
Valeur des biens donnés : 4.000.000
Soit, par donateur : 2.000.000
Valeur de la nue-propriété au jour de la donation : 60% 1.200.000
Soit par parent et par enfant : 600.000
Abattement en ligne directe : 100.000 (-)
Assiette imposable aux droits de donation : 500.000
Droits de donation par enfant (et par part) : 98.194 (1)
Total des droits de donation : 392.776
- 000 x 20% – 1.806 = 98.194
Les époux vont payer ces droits (392.776 euros) et investir avec leurs enfants la somme de 3.007.224 (3.400.000 – 392.776) au sein d’un portefeuille titre démembré, ou de tout autre support démembré. Cette somme est placée aux mêmes conditions que celles appliquées au contrat d’assurance-vie (3% net de tout impôt et taxe) génère, en N+20, un capital de 5.431.381 euros.
Au décès d’un des époux, le conjoint survivant conservera un usufruit sur l’intégralité des capitaux et du bien immobilier et il le transmettra lui-même vers les enfants, à son décès, et ce, sans aucun droits de succession (article 1133 CGI).
- Dans ce cas, le patrimoine net transmis par les deux parents à leurs enfants s’élève donc à 5.431.381 + 600.000 =6.031.381 euros.
- L’économie par rapport au premier schéma est de 1.758.741 euros !!!!
- L’économie par rapport au deuxième schéma est de 1.073.163 euros !!!
- L’économie par rapport au troisième schéma est de 708.427 euros !!
- L’économie par rapport au quatrième schéma est de 592.047 euros !!
On constate qu’avec la donation en nue-propriété, le gain fiscal s’accroît principalement à un double rythme : celui du temps qui passe (espérance de vie) et celui de la performance des actifs sous gestion.
Ne connaissant ni la date de notre décès, ni la performance future de nos actifs financiers, il est en réalité impossible de calculer une exacte économie fiscale.
Il est certain que, si par malheur, les deux époux devaient décéder à brève échéance, la donation en nue-propriété aurait un intérêt fiscal moindre.
Conclusions
Les quatre cas examinés aboutissent au même résultat : le capital et le bien immobilier sont transmis aux enfants mais en employant des techniques de transmission différentes ce qui induit des effets civils et fiscaux différents.
Il faut garder à l’esprit que la donation en nue-propriété est un acte de dépossession immédiat et irrévocable.
Dès lors que les biens à transmettre ont un potentiel de valorisation important, il paraît judicieux de privilégier les solutions qui exonèrent cette valorisation (par exemple en donnant en nue-propriété).
De plus, le recours à la société civile, par exemple, permettra aux donateurs de contrôler les capitaux et les biens immobiliers donnés.
Michel SAUBLENS
Expert en gestion de patrimoine
OPTINVEST
Actualités Fiscales, Financières & Patrimoniales
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Notre cabinet est inscrit auprès de l’ORIAS, en tant que Courtier en opérations de banque et en services de paiement (COBSP), sous le numéro 11063282. De ce fait, l’offre proposée par les COBSP est plus globale que celle des banques et permet ainsi d’obtenir la meilleure solution de crédit. C’est un gain de temps et d’argent pour le consommateur.